Le verbe
parler autorise deux constructions : « parler le français » avec l’article ou « parler français » sans l’article.
Dans le premier cas, le sens est virtuel ou largement ouvert. L’expression peut notamment être complétée par un substantif : parler le français de Molière. Dans le deuxième cas, sans article, le sens implique une réalisation ou une différenciation : il parle français et non anglais.
Par ailleurs l’absence d’article donne lieu à des expressions figurées : parler français, c’est à dire parler clairement. Cet extrait de la
Vie de Marianne de Beaumarchais le montre clairement : « Le discours était assez net, il était difficile de parler plus français ».
On peut aussi trouver cette construction avec un nom d’homme (« parler Vaugelas », c’est à dire très correctement), un nom commun indiquant une façon de parler (« parler raison », c’est à dire sagement, « parler curé », comme un curé) ou le thème de la conversation (« parler musique », « parler affaires »). On trouve les mêmes constructions avec les verbes raisonner (« raisonner langue, histoire et grammaire »),
songer, rêver, respirer et dans les slogans publicitaires : « Dormez Simmons », « Pour vivre heureux vivons Périer »… Mais, en dehors de la publicité, ces constructions sont exceptionnelles et appellent les guillemets.
Le livre
Le papyrus, fourni par l’Egypte, a été jusqu’au VIIe siècle le support d’écriture des Romains et des Mérovingiens. Le parchemin (dont le nom vient de la ville de Pergame en Asie Mineure), déjà utilisé pour les ouvrages de luxe de l’Empire romain, est devenu le support habituel des écrits. Remplacé par le papier, inventé par les Arabes au XIIIe siècle, le parchemin trop coûteux a été réservé aux actes officiels puis a disparu de l’usage courant. Le mot carte, qui désignait en Italie le papier, a connu en français des sens divers précisés par leurs compléments avant de désigner, sous son dérivé carton, un papier très fort. C’est le mot papier, dérivé de papyrus avec le suffixe –ier, qui, dès le XIIIe siècle, a été utilisé et a donné ensuite les dérivés papetier et papeterie au XVe et au XVIe siècle. C’est ce dernier mot qui s’est ensuite répandu dans les autres langues européennes.
Le mot livre (liber : écorce sur laquelle on pouvait écrire) désigne dans le monde romain le contenu d’un rouleau de papyrus : ainsi l’Enéide était divisée en douze livres ou rouleaux, encore appelés volumines. Le volumen a donné le mot volume en français qui désigne très précisément une partie de livre. Le mot tome, emprunté au latin tomus au XVe siècle (tomos : coupure) s’applique à une partie de la composition d’un ouvrage.
Le livret (XIIIe siècle) est un diminutif de livre et désigne de façon spécialisée le support écrit d’un opéra, l’opuscule a été emprunté au XVIe siècle au latin opusculum, diminutif de opus (ouvrage), la brochure est un dérivé du début du XVIIIe siècle du verbe brocher (coudre les feuilles à l’aide d’une broche). Le monde de l’écrit c’est aussi celui du numérique et des médias mais ce sera pour une autre rubrique.
(F. Argod-Dutard)