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De la vigne au vin...


... ou La petite histoire de mots bons à boire

" Il n’y a de sérieux ici-bas que la culture de la vigne "
Voltaire

Le mot vigne qui désignait en latin le lieu planté de vigne (vinea < vinum : « le vin ») a éliminé le latin vitis qui dénommait la plante. Ce mot a laissé néanmoins des traces : il reste sous la forme vis (l’outil) et son diminutif viticula a donné vrille (avec un r qui rappelle virer) pour signaler la partie de la vigne et l’outil qui lui ressemble. Bien évidemment, on retrouve cette racine dans des réfections savantes comme viticulteur, viticulture. Les dérivés de vigne sont nombreux et parfois inattendus : si vignoble et vigneron sont assez transparents, en revanche, la vignette, reçu de la taxe autrefois payée par les automobilistes, semble étrangère au mot vigne. Mais il n’en est rien. Jusqu’au XVIe siècle, on appelait ainsi les ornements en forme de branches de vigne dont on décorait les coupes ou les fourreaux d’épée puis le mot est passé dans le vocabulaire de l’imprimerie pour désigner de petites gravures et, enfin, dans une évolution récente, des images détachées, comme des timbres, par exemple.
Le mot cep (du latin cippus : « pieu enfoncé en terre »), par contiguïté sémantique, a désigné le pied de vigne qui produit le sarment (sarmentum). En poésie, c’est le pampre (pampinus) qui est plutôt usité. Le raisin lui-même a pris le nom de la grappe en latin (racemus), mot qui a éliminé uva (sauf dans quelques formations savantes récentes). La grappe elle-même et ses dérivés ont été désignés par un mot germanique Krappa (« crochet » dont le sens premier subsiste dans grappin). Dépouillée de ses raisins, elle reçoit le nom de râfle ou râpe (dérivés de mots germaniques signifiant rafler, gratter).
Le mot vendange vient naturellement du latin vindemia qui a servi à former à l’époque révolutionnaire le mot vendémiaire, le mois des vendanges (septembre-octobre). Le pressoir est apparenté au verbe presser (< lat. pressorium, IVe siècle) mais le mot calcatorium (dérivé de calcare : « f ouler aux pieds ») a donné chauchoir dans les parlers de l’Est et le mot allemand kelter.
Le moût vient du latin mustum et vin du latin vinum, mot qui s’est répandu dans les langues romanes et germaniques. Il participe à des dérivés courants (vinage) ou savants (vinicole, vinification), la racine grecque oinos étant réservée aux vocables scientifiques comme œnologie, par exemple.
C’est donc un vocabulaire majoritairement latin qui forme la base des mots de la vigne et du vin, comme il fallait s’y attendre pour une plante et une production d’origine méditerranéenne. (Pour plus d’informations, voir Voyage aux pays du vin, F. Argod-Dutard, R. Laffont, Bouquins, 2007, « Les mots du vin », p. 1115-1236).
(F. Argod-Dutard)


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